La Justipute  et le crépuscule de Bagata : cadeaux de fin d’année de Sammy D’elsan Bialu aux amoureux des belles-lettres !

Culture
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Les lecteurs de Media Actualité s’accoutument de plus en plus avec l’écriture percutante de ce barde des temps modernes ci-dessus nommé. Depuis son surgissement dans l’espace poétique congolais, celui-ci surprend de plus en plus le public avec une poésie porteuse d’un message d’éveil panafricaniste ou patriotique, au delà du fait qu’elle réveille également en nous le sens de la beauté de la nature féerique et variée, dont le Tout Puissant a gavée le berceau de  l’humanité en général, et le pays de Bolamba Lokole en particulier.

Le voilà qui nous revient avec deux aubades d’une élégance élégiaque indiscutable, qui se dispute la palme avec son contenu cérémonieux. La première, qui se titre tout simplement Justipute, n’a comme ambition que celle de blâmer cette Justice qui n’a plus la vocation de garantir la paix sociale, tellement elle cherche à se comporter en p***. C’est cette justice qui entraîne notre dignité dans la boue, que récuse d’ailleurs le ministre d’État chargé de la Justice et Garde-sceau, Son Excellence Constant Mutamba Tungunga, qui est mise en cause ici par le poète sidéré. Écoutons-le donc  entonner cet hymne plein de sagacité.

Justipute 

Lorsque l’iniquité s’installe au palais de la justice,                                         

La complaisance y devient monnaie courante,                                              

Aucune personne lambda ne voudrait 

Encore se confier à cette Justipute.        Devant en effet une parodie de justice, 

Le Peuple  fait carrément fi, 

Et se rit de cette machination !                  

Mais dans l’incapacité de lui faire face,    Il reste bouche bée, 

Lorsqu’elle prononce sa sentence !            Au hall de cette trainée de justice,

les indigents sont envoyés au diable !

Même s’ils piquent une colère bleue, 

Leurs récriminations restent lettre morte.

Leurs peaux ont des démangeaisons,  

Lorsqu’ils sont en face des toges noires, Portées par les magistrats assis ou debout, 

Même par leurs propres avocats, Engagés ou commis d’office.

Ils ne savent pas comment procéder,

Pour que la vérité devienne véridique, 

Leur triste sort les attriste, 

Au point de ne plus faire foi, 

aux praticiens et tacticiens du droit, 

Qui se moquent éperdument de leur foi !

Tous les diseurs factices de droit         

Se liguent contre les tenants de la panade, 

Qui ne savent plus à quel saint se vouer ! L’état de droit semble avoir produit 

Plus d’inégalités que celui de non droit.

La voix des sans voix a la voix brisée,

Le dire le droit se fie aux apparences, Pour décréter qui doit en être crédirentier.

Et la Justipute mortifie les va-nu-pieds,

A la chambre d’une justice insalubre.

Les démunis respirent d’une manière glauque,

Mystifiés et étouffés par la loi du plus fort,

Et dans les cageots des damnés, Exsangues, ils sont mis en hibernation, Faute de ne savoir se mouvoir dans une pièce exiguë.

Et leurs yeux à la quête du jugement dernier, 

Se butent aux relents des contre-vérités, 

Et à l’annonce du verdict, 

leur respiration s’estompe, 

s’éteint ou se casse les dents  !

Et la Justipute sabre, 

Ou sable, le pétillant champagne,

En embrassant des justiciers volages.

Cette putain de justice, 

Qui aime trop la luxure, 

S’offre souvent aux plus offrants  !

Comme toutes les belles filles de joie, 

Elle s’assemble avec joie à la table 

De la licence et de l’indécence !

Mangeant à tous les râteliers, 

En riant à gorge déployée, 

La putain aime les fatuités, 

Son vrai amant,

Ainsi que des baiser de Judas, 

Son vrai mentor ! 

Prompte à soumettre les faibles aux ordalies, 

Elle évite tout heurt avec les puissants.

Le justiciable qui  flirte avec elle, 

N’est jamais attaqué de front !

A force de faire l’amour avec le mensonge,

Elle s’imbibe du parfum de l’opprobre.

La fuite en avant 

Fait partie de son stratagème,

Vaut mieux s’extirper de l’attrape-nigaud, 

Plutôt que d’avoir à se débattre avec elle.

Les justifiables attendent la fin de recréation,

En se confiant aux bondieuseries, 

Pensant que seule une dévotion bigote, 

Peut détruire les privilèges de la Justipute.

On a pendant trop longtemps attendu 

Le retour de la justice de Dieu,

Afin que le sang des innocents 

Envoyés imprudemment à l’échafaud,

Puisse être enfin vengé !

L’on a cru que le poignard sera retiré du dos de la victime !

Que le corrompu sera tailladé par la vérité,

Qui conduit à la vie éternelle !

Que la vraie justice va rejaillir, 

Comme savait la rendre le Roi Salomon,

Mais sûre de ses comparses en tenue de corbeau, 

Le couteau sera fourré aux mains 

des Brutus, 

Via des billets verts ensanglantés !

la Justipute nous revient,

Sous forme de ces machetteurs,

Que d’aucuns appellent « Kulunas ».

Mais le jour viendra,

Où nos juridictions cracheront 

Sur les vilenies de la concupiscence.

Et les pauvres seront traités 

De la même manière que les nantis !

L’équité deviendra la bréviaire 

De ces censeurs en noir & blanc  !

Il n’y aura pas de justice que pour les ploutocrates, 

Mais aussi pour les paysans et les prolétaires !

En ce moment-là, la frivole Justipute disparaîtra dans l’air du temps,

Qui s’écoulera au rythme de la vérité !

Lorsqu’on quitte ce lyrisme sentencieux, on se laisse aussitôt cajoler par celui extatique, contemplatif, qui s’intitule sans ambages : 

Le crépuscule de Bagata ! 

On n’y vend point d’or voluptueux, 

Pour larguer ses charmes à moindre coût, 

Le crépuscule Bagatais, 

Si près du mutisme du bagadais,                Après une affreuse journée à Bagata, Posé sur un tronc d’arbre 

Le long de la sinueuse rivière Kwilu.          Plongé dans un filandreux tempérament, Sous la pression dévorante

  Et de sottes railleries de la débrouillardise,

Avalant la dernière potion du doux soleil, 

Je vibre sous le charme de Bagata, 

De celui de sa soumission surprenante, Qui surgit, comme un bagadais, en fin de journée !

Sous la fagacée du vieillard solitaire, J’entends les bruits des coléoptères, 

Qui chantent à la cadence de la rivière Inzia, 

Aux heures vespérales.

La lampe feutrée couvre mon ombre biaisée,

Le paysage de Bagata visualise et prédit, Qu’à l’orée du soir va commencer le cauchemar, 

De l’insomnie, qui se trottine au coucher du soleil.

Tout calme mon doux paysage, 

Ses vieux charmes se mettent en veilleuse, 

Comme pour abattre l’indifférence ambiante, 

Et illuminer la pression d’un entourage délétère !

Emballe-moi, Bagata, 

Dans ton paradis céleste, 

Même si ton jour menace et ta lune rassure, 

Ta sérénité, qui m’élève au jardin d’éden, Me rappelle la platitude de la planète bleue.

Et une humanité naïve, innocente et sans calcul, 

Se dessine avec hargne au réveil de ton matin, 

Quand les malheureux citadins 

Respirent déjà de l’huile moteur.

La lumière nocturne de Bagata, 

Par son incandescence pâle, 

A sombré dès l’apparition du lendemain,  

Dans l’abîme de l’ennui.                                Effrayée par l’écho des embouteillages, Malmenée par son entourage mécanique,

La circulation dense de grandes villes, Finit ses jours sans lune  et sans lumière.

                                                                          L’âme de Bagata s’étale alors,

Sur le doux pagne de ma compagne, Transportée par le chant de la gaminerie,

Ma nostalgie explose au jeu de cache-cache,

Lors de la danse des historiettes primitives, 

La joie invendable de ce bled, 

Me rend si heureux que je m’envole

Dans le sobre univers du goût de l’éternité,

Cloîtré dans le symbolisme ancestral.      Fiché dans la lignée héroïque des glaïeuls, 

Même si j’étais leur futile réincarnation, Mon mutisme confirme la destinée héroïque de Bagata,

Encastré dans son sombre feuillage.

Vivre dans le crépuscule de cette agglomération anodine,

Serait ma réelle destinée, 

une bosse au carrefour du gagne-pain, 

La chimère quasi insupportable,

Où sans carrosse, 

J’ai déjà roulé ma bosse.

La sérénité et l’affection de ce trou,

Eloigne ma fatigue et mes stresses, Comme ma charmante Beya, 

Qui s’étiole dans un univers infini. 

Du souffle de braise au petit repas sur la natte,

En passant par le service de la pipe, 

Le crépuscule de Bagata s’étend en une demi-journée, 

Ma perspicacité devient mon compagnon de lutte.  L’assembleur des couples, 

Comme les cyprès de la colline,

Qui soigne ses multiples déchetteries, 

Et efface les maigres mots de frileux camarades.                                                    Quand la garance de la jet set,

Veut l’emberlificoter au son de Lal’a’bi,

Même si son commerce n’est pas au Zenith, 

Du matin au soir, on y gagne souvent en air frais !

En dégustant ce genre de merveilles, la constellation de lecteurs de notre tabloïd sera reconnaissante à leur auteur, Sammy D’elsan Bialu Kalambayi, pour leur avoir permis de goûter aux délices des muses, à l’orée de l’an 2025, qui se pointe déjà à l’horizon.

Jean-Paul Brigode ILOPI Bokanga/Directeur de rédaction.

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